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Gouvernance et citoyenneté

Comité des régions - 04.11.2020

Président du CdR : « La réponse à la crise financière locale ne peut être laissée aux seuls États membres »
La COVID-19 a eu un impact immédiat et dévastateur sur nos territoires. Que faut-il faire pour éviter de répéter les erreurs des premières semaines de la crise ? Comment l'Union européenne peut-elle soutenir les communes et les régions à participer pleinement à la reprise économique et sociale ?

En proie à une deuxième vague de la pandémie du coronavirus, nous avons discuté de cette question et de bien d'autres avec le président du Comité européen des régions, Apostolos Tzitzikostas.

Vous avez eu un début de mandat très difficile en raison de la pandémie de coronavirus. Qu'aimeriez-vous accomplir d’ici la fin de votre mandat ? 

Rapprocher l'Europe des citoyens à travers ses villages, villes et régions constitue la principale priorité de mon mandat. La pandémie a rendu cela encore plus urgent et nécessaire. Alors que les dirigeants locaux et régionaux étaient en première ligne pour faire face à la COVID-19, le Comité des régions a soutenu leurs efforts en mettant en place une plateforme d'échange et de soutien, et en présentant des propositions concrètes pour travailler main dans la main avec l’UE.

Nous avons proposé un mécanisme européen d’urgence sanitaire et demandé instamment une flexibilité pour reprogrammer les fonds structurels. Nous avons affirmé sans relâche la nécessité d'un plan de relance européen exceptionnel. Beaucoup de nos demandes ont été prises en compte dans les propositions de la Commission européenne et dans l'accord du mois de juillet entre les États membres. 

La priorité est désormais de continuer à œuvrer pour une reprise ascendante, inclusive et durable. De même, la prise de conscience grandissante du rôle des dirigeants locaux doit nous permettre de franchir de nouvelles étapes vers une Europe tridimensionnelle, dans laquelle au-delà d’une simple fonction consultative, nous pourrons prendre les décisions aux côtés des acteurs européens et nationaux.

Le CdR vient de publier le premier baromètre européen annuel des collectivités territoriales, qui répertorie les expériences des villes et des régions au cours des premiers mois de la crise de la COVID-19. Quels sont les principaux résultats de cette première édition ? 

Le baromètre régional montre que la pandémie a eu un fort impact sur tous les territoires, mais que certaines zones sont particulièrement vulnérables, avec de grandes difficultés pour faire face aux situations d'urgence et amorcer la relance. 

Nous devons répondre à cette « nouvelle géographie des disparités régionales ». Nous devons nous assurer que le prochain budget de l'UE et l’instrument « Next Generation EU » reposent sur une planification intelligente et surtout basée sur les besoins de nos territoires.

En particulier, le baromètre met en évidence deux tendances très inquiétantes : un « effet de ciseaux », avec des recettes en baisse et des dépenses en augmentation, qui met en péril les finances publiques de nos communes et régions. Les collectivités territoriales en France, en Allemagne et en Italie auront des pertes de 30 milliards d'euros rien qu'en 2020. Plus de 90% des régions et communes de l'UE prévoient une baisse de leurs revenus et si nos services publics s'effondrent, la reprise sera plus lente et plus dure.

Quant aux jeunes, nous courons le risque d’une génération perdue à cause de la COVID-19. Les jeunes travailleurs, souvent avec des contrats flexibles ou de courte durée, sont particulièrement exposés aux risques de chômage sans garanties ni filets de sécurité. En outre, seuls six États membres sont en mesure d'offrir une éducation numérique à 80% ou plus de leurs étudiants. Nous devons les aider et éviter que cette crise ne mette en péril notre avenir.

Les données suggèrent que l'Europe est en proie à une deuxième vague de la pandémie. Que faut-il faire pour éviter de répéter les erreurs des premières semaines de la crise ? 

Nous avons appris de la crise que seul un partenariat efficace impliquant les institutions européennes, les gouvernements nationaux et les collectivités peut protéger nos citoyens contre une menace commune. Nous avons également appris que la responsabilité personnelle est essentielle pour notre sécurité, à la fois en tant qu'individus et en tant que communautés.

La deuxième vague est là mais on ne sait pas si elle a atteint son pic. Cependant nous savons plusieurs choses : que la fermeture des frontières sans aucune coordination ni cohérence entre les régions et les pays ne fonctionne pas ; que minimiser le rôle des mesures de sécurité de base est une forme dangereuse de populisme ; que l'UE a besoin de plus de compétences en matière de santé ; et que nous devons tous investir davantage dans la santé publique et la résilience des services publics. Cela est particulièrement urgent dans les Etats membres où l'évolution dramatique de la dette publique a conduit, au cours des deux dernières décennies, à un affaiblissement dangereux de tous les services publics.

Selon le baromètre du CdR, plus de 90% des régions et communes de l’UE prévoient une chute de leurs revenus. Quelle action est nécessaire au niveau de l'UE pour aider à restaurer cette perte de revenus ? 

L'effet de ciseaux menace à la fois les services publics et l'investissement public. Nous devons travailler sur ces deux problématiques de frontcar la crise et la reprise seront particulièrement dures si les services publics locaux - qui sont décisifs pour la cohésion sociale et la résilience locale - ne sont pas seulement préservés, mais renforcés, rendus plus intelligents et plus durables. 

En ce qui concerne le financement de projets porteurs de croissance, les collectivités territoriales représentent la moitié des investissements publics de l'UE. Sans rallumer le moteur à plein régime, la relance de nos économies sera impossible.

Si un accord entre les États membres sur le budget de l'UE et les plans de relance est conclu à temps, une capacité d'investissement sans précédent pourrait apporter des avantages et un soutien concret aux citoyens et aux entreprises de nos régions. Mais la réponse à la crise financière locale ne peut être laissée aux seuls États membres.

Nous avons besoin que l'UE propose des instruments financiers et des programmes de soutien là où les finances nationales ne sont pas en mesure de faire face à l'impact de l'effet de ciseaux.

La présidente von der Leyen a déclaré que les gouvernements locaux et régionaux seront au cœur de notre reprise. Assistons-nous enfin à un changement dans la façon dont les choses sont faites au niveau de l'UE ? 

Nous avons accueilli chaleureusement les messages de la présidente von der Leyen lors du débat en plénière sur le baromètre. Ce discours doit marquer un tournant à l’heure où l'urgence peut pousser nombre de personnes à considérer la centralisation comme un moyen de simplifier et d'accélérer les investissements. 

La Présidente s'est montrée pleinement consciente du travail effectué par les dirigeants locaux et régionaux pendant ces mois difficiles et de la nécessité de les impliquer afin de garantir que les financements parviennent à ceux qui en ont le plus besoin. De plus, la présidente von der Leyen partage notre point de vue selon lequel les régions et les municipalités sont les mieux placées pour assurer une reprise verte et numérique sur le terrain.

Deux jours après l'échange avec la présidente von der Leyen, nous avons discuté avec le commissaire européen Gentiloni de notre position sur le mécanisme de relance et de résilience. Il a réitéré l'appel lancé aux États membres pour impliquer les gouvernements locaux et régionaux non seulement dans la mise en œuvre, mais aussi dans l'élaboration des plans de relance. Nous coopérerons pour promouvoir le principe de partenariat, ainsi que pour suivre et évaluer la participation des régions et des villes, afin de maximiser l'impact de ce nouveau mécanisme très efficace. 

Comment pouvons-nous nous assurer que les collectivités soient pleinement impliquées dans le plan de relance ? 

Le Comité des régions a proposé un code de conduite sur le partenariat pour guider la coopération entre les différents niveaux de gouvernement, dans le plein respect de la répartition des compétences au sein des États membres de l'UE. La Commission européenne s'est engagée à suivre et à évaluer cette implication. 

Au-delà des aspects réglementaires, nous travaillons pour faire prendre conscience aux gouvernements nationaux qu'il n'y a pas d'impact sans partenariat pour deux raisons principales : nous devons prendre en compte l'impact asymétrique de la pandémie ; mais nous devons également coordonner les différents outils de financement pour éviter les chevauchements, les incohérences ou, pire encore, une « concurrence » entre ce nouveau mécanisme, les fonds structurels et d'autres instruments financiers. Le risque est que nous finissions par soutenir les projets les plus pertinents, visibles et prometteurs en évitant les plus complexes. 

Nous ne pouvons pas nous permettre une approche aussi contre-productive ; nous devons tirer le meilleur parti de chaque euro de l'argent des contribuables. 

Lors d'une réunion du CCRE organisée avec des élus, le député européen Jan Olbrycht a souligné que « les nouveaux fonds changeront l'UE car ils créeront une Union plus forte avec des ressources propres ». Partagez-vous ce point de vue ? 

Ce n'est pas la première fois que la Commission européenne rassemble des ressources provenant du marché financier international, mais la convergence des États membres sur une opération financière de cette dimension est sans aucun doute une étape historique pour notre Union, qui change la donne dans la croissance et les politiques financières de l'UE.

L'ampleur du plan de relance de l'UE est pleinement justifiée par l'urgence sans précédente à laquelle nous devons faire face. Mais cela ne doit pas nous faire oublier le sens et les implications de la décision de mobiliser jusqu'à 1.800 milliards d'euros jusqu'en 2027. 

Et le Parlement européen a parfaitement raison dans sa demande ferme de s'engager clairement sur de nouvelles ressources propres. Cependant, la réaction des marchés à l'émission d'obligations pour l'initiative SURE montre déjà une forte confiance dans le plan global de relance de l'UE. Faisons-en sorte que ça marche.

Quelle pourrait être la contribution de la Conférence sur l'avenir de l'Europe ? 

La conférence sur l'avenir de l'Europe devrait améliorer la Maison de la démocratie européenne. Pour ce faire, la Conférence doit être plus qu'un « concours de beauté » entre institutions basées à Bruxelles. Elle doit atteindre les citoyens et identifier des solutions viables pour combler le fossé entre les institutions de l'UE et les Européens. Parmi ces solutions, nous proposerons de renforcer le rôle et la participation active d’un million d’élus locaux de toute l'UE.

Les gouvernements locaux et régionaux sont une composante fondamentale de la Maison de la démocratie européenne. Les États membres représentent les murs, les institutions européennes le toit et nous, les collectivités, sommes ses fondations. Si cette Conférence ne nous laisse que des mots, nous aurons manqué une occasion historique. 

Le Comité des régions coopère de manière proactive avec le Parlement européen, la Commission et le Conseil pour promouvoir des objectifs ambitieux et une approche inclusive, dans le plein respect des recommandations sur la subsidiarité active adoptées par la Commission.

Sur quelles questions clés le CdR et le CCRE devraient-ils collaborer étroitement dans les années à venir ? 

La création et les réussites de l'Alliance pour la cohésion représentent un bon exemple de l'efficacité et des avantages de notre coopération. La nouvelle approche plus large de l'Alliance, avec une attention renouvelée à la contribution de toutes les politiques de l'UE (y compris l’instrument « Next Generation EU ») à l'amélioration de la cohésion et aux synergies entre les fonds ESI et les autres outils de financement de l'UE, offre désormais de bonnes opportunités pour intensifier notre coopération.

J'apprécie beaucoup le travail réalisé par le CCRE au sein de l'Accord des villes vertes, ainsi que sur les Objectifs de développement durable de l’ONU. Dans cette optique, parallèlement aux dossiers de cohésion, la dimension territoriale de la relance de l'UE et du Pacte Vert peut constituer la principale priorité de notre travail commun.
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